Parce que tout le monde a le droit de boire bon au réveillon.


Les réveillons arrivent, et avec eux, depuis quelques semaines, sur papier glacé, les bouteilles que nous devrions boire à cette occasion. "Ô, douce nuit", douce, oui, mais pas forcément les prix des flacons en question, plus durs que doux. Il est vrai que ces amoncellements d'étiquettes sont plus à visées commerciales qu'à vertus informatives, il s'agit davantage de vendre de la pub pour le champagne et les crus qu'on trouve meilleurs quand on ne les paye pas que d'indiquer réellement au consommateur avec quoi il se fera plaisir au pied du sapin ou en attendant les douze coups de minuit.
Sans tomber dans le misérabilisme, il est bon de rappeler que le prix moyen d'une bouteille achetée en France tourne autour des cinq euros, beaucoup moins même si l'on tient compte du tiers des achats qui se font en cubis. Et plutôt que de mépriser le consommateur moyen, celui qui "ne sait pas", ne veut pas trop dépenser, comme le font trop souvent les spécialistes (et parfois même les cavistes), pourquoi ne pas lui donner des pistes afin qu'il se fasse plaisir sans "se ruiner"? C'est dans cette optique que j'ai sélectionné quelques vins qui permettront d'arroser un Noël ou un Nouvel An "prolétaires".


D'abord, il faut une bulle. Évitons le champagne du rayon du bas, à 9,99€, et filons vers une région que les snobs fuient comme la peste et qui régale les francs buveurs, Limoux. On y trouve des hectolitres d'effervescents de grande qualité (non chaptalisés eux…), vendus à des tarifs dont la douceur frise l'indécence. Dans cette appellation de l'extrême ouest du Languedoc, fraîche grâce à l'influence pyrénéenne, de nombreux vignerons travaillent bien, Gilles Azam, Jean-Louis Denois, Alain Cavaillès, Le Domaine J.Laurens, la famille Robert, entre autres. Dans le cadre de ce Noël économique, j'ai sélectionné une cuvée de la maison Antech, la blanquette Réserve Brut, excellente bulle de mauzac, chenin et chardonnay que votre caviste vous vendra dans les sept-huit euros.


Comme on a dépensé "beaucoup" pour la bulle, on va se calmer avec le blanc, d'autant que si l'on veut aller manger quelques huîtres, mieux vaut économiser un peu. Le muscadet présente de nombreuses options qui répondent à notre cahier des charges (essayez le Domaine de La Chauvinière, à Château-Thébault), mais nous allons rester en Languedoc avec un cru populaire, le picpoul-de-pinet. En prime, notre picpoul sera bio, produit par Floriane et Olivier Azan au Domaine de Petit Roubié, à Pinet même, enfin dans sa campagne qui mire l'étang de Thau. C'est frais, vivant et fera merveille sur les produits de la mer. Son prix? Tenez-vous bien! 5,65€!



Reste à trouver du rouge pour accompagner un beau et gros poulet rôti qu'on sera allé acheter à la ferme. La tentation est forte de rester dans ce même Domaine du Petit Roubié avec un cabernet-sauvignon, délicieux à moins de cinq euros mais tant qu'à boire "bordelais", on va filer à la maison-mère, en Gironde, à Saint-Vincent-de-Paul, au bord de la Dordogne finissante, chez Xavier Landeau. Son Domaine de Grange Brûlée, à sept euros est un cadeau. En restant dans le Sud-Ouest, on pensera au grandissime terroir de cahors, avec à moins de six euros, Le pur fruit du Causse de mon copain Julien Ilbert ou le Clos Siguier de ses presque voisins de Montcuq, les deux en bio. Un joli rapport prix/plaisir également en Loire, à Saix, avec le saumur du Domaine du Bois mignon, fruité et charnu, ou bien le "petit" chinon de Wilfrid Rousse, Les Galuches, bio également.


Pour un cru plus corsé à tendance castelnovienne, on ira sur l'autre rive du Rhône, chercher les grenaches des vignerons d'Estézargues, une des rares coopés éthiques. On se régalera du minervois de base de Michel Escande à Borie de Maurel (je me souviendrai toujours de la tête de Jean-Paul Kauffmann quand je lui ai annoncé le prix ridicule de ce rouge remarquable, bio de surcroît, alors que nous pique-niquions à l'église de Centeilles). Ceux qui veulent casser leurs tirelires pour jouer les milliardaires en s'offrant un clin d'œil aux bourgognes (c'est chouette sur le poulet rôti!) auront le choix entre deux remarquables pinots noirs languedociens: celui de la famille Girard en Malepère, ou celui plus montagnard de Jeff Carrel, les deux à moins de neuf euros.
Enfin, au chapitre des douceurs, en vous souhaitant vivement d'échapper à la bûche (j'ai horreur de ça), allez faire un petit tour à Rivesaltes, à Gaillac, Monbazillac ou à Sainte-Croix du Mont.
Joyeux Noël, bonnes fêtes à tous, y compris aux moins démunis qui boiront des vins plus chers…









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