Merci à l'État Islamique !


"Fontaine, je ne boirai pas de ton eau…" Vous m'auriez demandé, il y a huit jours encore si j'allais boire du beaujolais, ou je ne sais quel vin nouveau, et je pense que j'aurais un peu fait la grimace. De l'eau, depuis, a coulé sous les ponts. Du sang, aussi. Vous imaginez le chemin parcouru en à peine une semaine? Vous avez remarqué l'inflexion, la gigantesque inflexion des discours. Ce qui vous valait il y a une semaine d'être traité d'immonde fasciste islamophobe vous rend aujourd'hui un peu mou, au regard des paroles d'un Manuel Valls ou d'un François Hollande. Quant à Marine Le Pen, elle apprend à ses dépends le sens d'une bonne vieille expression française: "se faire couper l'herbe sous le pied". 


Pourtant, comme la plupart d'entre vous, moi, hier soir, à Barcelone, j'ai bu du beaujolais nouveau (et même un beaujolais blanc nouveau dont je n'ai pas le droit de parler). J'en ai bu d'abord dans le cadre très feutré de Monvínic. D'habitude, dans ce temple du vin chic, on ne s'amuse pas à ce genre de choses, mais cette année, il était difficile, au travers de ce symbole, de ne pas saluer la France. Alors nous avons trinqué, avec nos voisins de table catalans, au Château Cambon, somme toute assez correct, étonnamment à l'aise sur des "crostini de ris de veau" les brochettes d'agneau et les beignets de morue de Guillem Oliva.


Puis, avec mon pote Vicente Corona, grand photographe de l'humain, nous sommes partis à la rencontre du vin canaille, à L'Ànima del Vi où, sous un drapeau tricolore, s'étaient donnée rendez-vous l'Internationale des buveurs. Un coup de Karim Vionnet, un peu trop dilué et banané à notre goût, puis on est passé aux choses sérieuses avec le remarquable beaujolais-villages de Xavier Benier, comme souvent un superbe jus; "il y a du vin là-dedans!" Une ou deux assiettes de tripes de la grand-mère aidant, ça nous a amené assez tard dans la nuit…


Mais, visiblement, au delà de notre goguette barcelonaise, les vieux aigris évinesques doivent faire de l'huile en France. Une de mes charmantes lectrices me signalait que le vin coulait à flots à la télévision. Ainsi sur Canal+, dans Le petit Journal, avec Yann Barthès lançant au journaliste américain de CNN, Anderson Cooper: "À Paris, il faut boire. C'est un acte militant, vous le savez?". Il faut dire que le New-York Times avait donné le ton avec sa couverture sur la "résistance française en terrasse, au bistrot". Le petit Journal qui en remet une couche, après avoir fait promettre à Anderson Cooper qu'il irait prendre un verre de vin à Paris, avec une apologie du rouge en terrasse sous la houlette de l'acteur Albert Dupontel qui explique que "c'est agréable de savoir qu'en buvant un coup, on les emmerde". 
Amusant de voire le vin retrouver sa place de symbole sinon d'une résistance, au moins d'un art de vivre. Agréable en tout cas qu'on le sorte d'un mépris qui commençait à devenir pesant.


Oh bien sûr, boire un coup, ça ne règle rien. Et ce n'est pas en se pochtronnant qu'on va neutraliser le nazislamisme. Dans cette guerre, il faudra garder les idées claires, faire preuve de froideur, tenir la distance. Mais quel bonheur, ce pied de nez, cette fête pour oublier les larmes, autour d'un drapeau dont nous sommes de nouveau fiers, autour d'un hymne qui n'est plus un "karaoké d'estrade" (pour reprendre les mots du ministre de la Justice français), autour du vin qui n'est plus une maladie honteuse. Pour ça, pour avoir réussi ce début de raccommodage de la France avec son identité, merci aux dégénérés de l'État Islamique!







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