Hygiène!


Les gens sont méchants, je le dis souvent. Et vindicatifs avec ça! Là, tenez, dans le monde du vin, on s'est trouvé une tête de Turc, les hygiénistes. Et vas-y que j'ouvre la boîte à gifles, que je t'en mets une! En avant la soupe de phalanges!
C'est vrai qu'ils sont bizarres, ces pauvres hygiénistes, pas tout à fait comme nous. Petit déjà, j'en avais entendu parler, si je me souviens bien, on disait la Croix bleue. Mon arrière-grand-père maternel en aurait fait partie, mais ça ne l'empêchait pas de taquiner le goulot; ça sentait bon, d'ailleurs dans sa cave à vin, un mélange d'humidité et la vieille pierre, ces dame-jeannes en cotte de mailles pleine de rasteau noir, ces étiquettes avec le château de Lourmarin dessiné dessus, sous la poussière, le vin de Lauris, fort comme le Rhône, frais comme la Durance. Pas bien méchante, la Croix bleue
Puis est arrivée l'époque du professeur Got, un petit monsieur vaguement inquiétant, galbé comme un lapin de trois semaines, avec un chandail tricoté par manman et un col pointu. Lui, c'était pas la Croix bleue. On l'entendait causer dans le poste avec sa voix à annoncer des mauvaises nouvelles. Ce n'est pas gentil, mais je n'aimais pas sa tête de vieil oncle célibataire.
Et puis, il y a ceux d'aujourd'hui, les hygiénistes de 2013, ceux que le monde du vin conchie et que je finis par trouver attendrissants. Bien sûr, c'est une drôle de clique qui veut réglementer, taxer, prohiber. Dedans il y a des toubibs qui immanquablement me font penser à ce docteur de la Sécu qui avait dit à une collègue de ma mère, enceinte de sept mois, "faites attention, vous avez pris un peu de ventre…" Globalement, de toute façon, ce qu'ils veulent, c'est notre bonheur. Comment leur en vouloir?


Et puis, surtout, ils sont rigolos les hygiénistes d'aujourd'hui. De Funès et les Marx Brothers, à côté d'eux, c'est juste une bande de croquemorts! J'ai encore mal au ventre du fou-rire qu'ils m'ont offert hier. Quoi, vous n'êtes pas encore au courant? Tenez, lisez, c'est ici, au bout de ce lien hypertexte. Des champions, je vous dis, les rois du comique troupier! En même temps, je comprends que leur humour ne fasse pas marrer tout le monde, je pense qu'hier soir du côté de Matignon, il y en a même un ou deux qui ont rit jaune.
Enfin moi, mes hygiénistes, je les défends. Et comme aujourd'hui, je suis d'humeur musicale, je leur offre une de ces raretés dont le rock n' roll a le secret. C'est tout eux, ce titre: Hygiène! C'est vers 77, du temps où les Lyonnais de Starshooter se faisaient appeler pour d'obscures raison les Scooters, une reprise du Sweet Jane de Lou Reed. Kent chantait un peu faux, le son était ce qu'il était, punk français, mais ça avait la pêche.
Et pour accompagner Starshooter, mes amis hygiénistes, je leur propose de boire un petit verre. Ça fait du bien de boire un petit verre quand on a un peu de mal à s'asseoir. Deux petits verres, même, parce que j'en connais un ou deux qui doivent l'avoir d'un diamètre équivalent à celui de la pièce de cinquante francs qu'on donnait aux confirmations. Dilaté.


Pour les petits verres, du vin français, bien sûr, puisqu'on a toujours le droit d'en parler sur Internet. Un blanc bien propre, d'abord, bien net. Le bourgogne générique 2011, tout bête de la famille Matrot à Meursault, c'est tendu comme une corde à piano. Éventuellement, ça peut avoir l'effet des citrons à la mi-temps. Et puis, un rouge, parce que comme le dit le camarade Berthomeau (Jacques, l'année érotique, c'est celle  d'après!), "laissons la peur du rouge aux bêtes à cornes". Là, encore, un truc bien clean, nature mais épilé comme une Brésilienne, "j'vous fais le maillot?" On a pris un vin du nord de Lyon pour le blanc, pour le rouge, ce sera un cépage du Sud de l'ancienne capitale des Gaules: de la syrah. Une syrah, mais languedocienne, juste mûre, ma non troppo, à boire comme ça, sur le coin du bar. Tant qu'on a le droit… N'y voyez pas malice, amis hygiénistes, elle s'appelle Paf, comme quelqu'un qui est un peu paf, un peu ivre, qui fait des trucs sans s'en rendre compte. Je l'adore cette syrah de Jeff Coutelou avec ses arômes camphrés, si j'osais, je dirais "pharmaceutiques". De là à dire que c'est un bon médicament, un des meilleurs anti-dépresseurs du Monde…
Bon, allez, mes potes hygiénistes, Santé! On se l'écoute ce morceau? "Hygiène, hygiène, hygiène…"


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