La quête du Graal


Je ne sais pas si c'est parce qu'ils ne mangent pas assez souvent de tricandilles, mais il y a des types qui ne sont pas en forme. Je le tiens de Marc Valette qui m'envoie une croustillante coupure du Midi-Libre, ce matin, alors que je m'adonne à mon sencha Fuji journalier. Moins apaisant que le thé vert, mais infiniment plus désopilant, l'imam de Téhéran, Kazem Sedighi, y explique scientifiquement que "l'augmentation des relations sexuelles illicites fait accroître le nombre des tremblements de terre".


Tant qu'à parler curetonailles, le gars Kazem, avant sa prière du vendredi, je crois que j'aurais bien fait de l'inviter à venir avec moi aux Capus, hier matin, participer à ma quête du Graal. Vous savez, je vous en parlais dans mon billet d'hier, j'étais à la recherche (il y a quelque chose de compulsif là-dedans!) de tricandilles, à l'occasion de mon passage en coup de vent à Bordeaux.


Petit éclairage culturelo-gastronomique pour ceux qui n'auraient jamais mis les pieds en Gironde, les tricandilles ce sont ces intestins grêle de cochon cuits au bouillon et qu'on grille ensuite, soit à la braise, soit à la poêle (à feu très vif!) en les rafraîchissant avec une pointe de bon vinaigre et en les finissant avec une légère tombée d'échalote et de persil.


Évidemment, les tricandilles au marché des Capucins*, c'est aussi facile à trouver que des cèpes en Dordogne (ou sous les arcades du marché de Libourne**…), tellement facile que j'en ai même acheté deux qualités différentes, des à vingt euros le kilo, d'autres à quatorze. Et évidemment, hier soir, fier comme Artaban, j'ai fait griller mon petit trésor à notre arrivée dans le Poitou. Ah s'il avait été là, le pauvre Kazem, s'il avait vu les yeux ébahis des gourmands qui ont dévoré le premier kilo de tricandilles que j'ai servi en entrée, ça lui aurait même peut-être chassé ses idées noires!


Au passage, je lui aurais parlé d'un mariage contre-Nature, car hier soir, en matière pinardière, j'étais d'humeur transgressive, c'est un chablis que j'ai débouché sur les tricandilles, un montmain 2008 de Thomas Pico, pas la meilleure bouteille que j'ai bue, un peu trop pomme à mon goût, un poil vrillée mais très chouette en bouche en revanche, assez coquin sur la tripe. 


Tant qu'à vous faire le menu, il faudrait que je vous parle des tomates du jardin, farcies, et des chèvres du Poitou arrivés en direct de La Chauvinière, à Saint-Germier, près de Ménigoute, des fromages qui mériteraient d'orner eux aussi l'étal, toujours remarquable, de Jean d'Alos (dont les merveilles avaient illuminé le repas de jeudi soir à Bordeaux). Et d'une grandiose bouteille, rapportée de Toulouse, du Tire-Bouchon, un comble alors qu'il s'agit d'un vin des environs, d'un superbe saumur-champigny 2010, le Clos Cristal, du beau breton, profond, au fruit intense, de haut vol, d'un niveau qui rend son prix, dans les onze-douze euros presque aussi ridicule que les délires du brave Kazem***.


* On a beau me dire parfois que les Capucins, c'est ne plus ce que c'était, si j'avais l'ombre de ça à Barcelone, je serais le roi! Après, je reconnais que leur modernisation architecturale m'en touche une sans faire bouger l'autre, pour reprendre l'expression de l'ancien mentor du Maire de Bordeaux…
** N'est-ce pas, ma chère Dany!
*** En fait, derrière le Clos Cristal, il y en a un autre qui s'est fait ridiculiser, c'est le Val Sotillo gran reserva 1989 qui est arrivé derrière, un ribera-del-duero sûrement un joli jus à l'origine mais emprisonné pour l'éternité dans un cercueil de bois qui gâchait tout.


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